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Il y a deux semaines, nous avions eu un bref aperçu des institutions mises en place par la métropole espagnole pour gouverner ses possessions d’outre-mer.

Le système est certes complexe, mais l’objectif de l’article était d’éclairer le lecteur sur le rôle des quelques personnages rencontrés par les flibustiers au cours de leurs échanges.

Je vais maintenant passer à l’organisation sociale.

Les Espagnols se sont organisés en un système hiérarchisé en castes. Son analyse est le sujet d’un vaste débat entre historiens pour savoir quel a vraiment été le rôle et la réalité de cette classification au cours des près de 300 ans d’histoire de cette partie du monde.

Par conséquent, je ne vais pas tenter d’y intervenir et encore moins de prendre position. Je vais me contenter d’un bref rappel.

Tableau des castes – Museo Nacional del Virreinato (Tepotzotlán, Mexico)

Origines

Difficile à dire.

Certains disent que la catégorisation de la société vient du vieux concept espagnol de limpieza de sangre (pureté du sang), datant de la fin de la Reconquista et classant les gens entre « vieux chrétiens » et nouveaux chrétiens (juifs et musulmans récemment convertis, de gré ou de force).

En Espagne, cela aura généré une tendance à la recherche de la « pureté du sang » pour tous ceux souhaitant exercer une charge ou une fonction importante au sein de la société. L’Inquisition était chargée des enquêtes sur la généalogie des candidats.

Cette tendance aurait eu pour conséquence, aux Amériques, de réserver les principales fonctions aux Espagnols de souche, les Españoles, directement originaires de la métropole, au détriment de la population locale.

Exemple de certificat de pureté du sang – Archives historiques de l’Université de Saint-Jacques de Compostelle (Collège de Fonseca)

Nouveau contexte

Au début, deux nouvelles catégories viennent donc s’ajouter au schéma préexistant : les Indios (Amérindiens et peuples autochtones) et les Negros (Noirs d’origine africaine, venus en tant qu’esclaves).

La présence de ces trois catégories sur un même territoire généra forcément un mélange, appelé mestizaje (métissage). Ajoutons à cela, les Españoles nés dans les colonies, appelés criollos (créoles).

Selon María Elena Martínez, le système des castes voit le jour pour protéger les privilèges et les richesses des Españoles, très minoritaires sur le continent, en les instituant comme groupe dominant (et ayant quasiment seuls accès aux hautes fonctions). Le reste de la société trouvant sa place dans la hiérarchie en fonction de son degré de sang espagnol.

À ce titre, Indios et Negros se voient cantonnés aux castes inférieures.

Avec le temps, le métissage allait en s’accentuant, créant de nouvelles catégories :

Le descendant d’un Espagnol et d’une Noire était un mulatto (mulâtre).

Le descendant d’un Espagnol et d’une Indienne était un mestizo ou castizo (métisse).

Le descendant d’un Espagnol et d’une mulâtre était un morisco (morisque).

Etc.

Des droits et des devoirs incombaient à certaines catégories. Par exemple, les Indios étaient sujets au paiement d’un tribut, par contre échappaient au contrôle de l’Inquisition. Les Españoles en revanche, exempts de tributs, pouvaient être poursuivis par cette institution.

Un Espagnol et une Mestiza et leur fille Castiza – Miguel Cabrera – Museo de América

Représentation en peinture

Bien d’autres castes ont existé, chacune avec son nom, et toutes les possibilités ont été représentées dans un courant de peinture propre à l’Espagne vice-royale, appelé « peinture de caste ».

Celles-ci représentent généralement un trio (père, mère et enfant), avec parfois des caractéristiques et qualités que l’on jugeait, pour l’époque, propres à la race.

Elles connurent un certain succès dans le Nouveau Monde et au-delà, montrant une vision un tant soit peu idéalisée de la société locale, où chaque membre entrait dans un « tiroir » prédéfini.

Espagnol et Albine – Juan Patricio Morlete Ruiz – © Jl FilpoC

Une autre réalité ?

Comme partout ailleurs, il y a une différence entre ce qui est théorisé et la réalité sur le terrain.

Bien que suggérant une certaine rigidité, ainsi qu’une imperméabilité, la recherche contemporaine semble montrer que les castes étaient plus poreuses et plus fluides qu’on ne pourrait le penser à première vue.

Dans les villages indigènes, les Indios qui avaient fait partie de la noblesse précolombienne conservaient une bonne partie de leurs privilèges et pouvaient intégrer les administrations et gouvernements locaux.

D’autre part, il était possible de falsifier sa généalogie pour passer d’une classe à l’autre, ou même de déménager dans un endroit où l’on n’était pas connu pour intégrer une autre caste. La fortune, ainsi que la manière dont on n’était pas perçu par les autres n’influençaient pas peu cette catégorisation.

Cela permettait de s’épargner les devoirs et les obligations d’une catégorie et de gagner les privilèges dont jouissait une autre, sachant qu’il devenait difficile à partir d’un certain moment, par exemple, de distinguer un criollo d’un mestizo.

Hacienda au Mexique – Frederick Catherwood — New York Public Library

In fine

Ce système, devenu lourd et désuet sur la fin du XVIIIe siècle, sera définitivement aboli lors de l’indépendance des différents pays de l’Empire espagnol.

Des nouvelles des livres

Les Editions Voilier Rouge auront sûrement le plaisir d’éditer quelques inédits, à savoir les journaux de bords et de voyages de passagers du premier navire français à effectuer une circumnavigation complète en passant par le Pérou et la Chine. Ce voyage, à but commercial, est bien peu connu et quasiment pas mentionné. Le travail est lancé.

Les lettres de Cortés ont pris un peu de retard, car le travail sur le sujet prend un peu plus de temps que prévu. Néanmoins, nous avançons.

Activités au port – Jan Van de Cappelle (Mauritshuis)

Sources

Ce qui est dit et écrit dans mes articles représente un assemblage de plusieurs hypothèses et faits dont je récupère l’essentiel sur différentes versions de Wikipedia (française, anglaise, allemande et espagnole), qui me relaient vers les travaux correspondant à ma recherche.

Ce n’est donc pas une thèse et il est tout à fait possible que je puisse me tromper lors de la rédaction. Si un lecteur venait à s’en apercevoir, il est libre de me le signaler afin que je procède à un amendement.

Genealogical fictions : limpieza de sangre, religion, and gender in colonial Mexico, María Elena Martínez, University of Southern California.

Social order in the New World, María Elena Martínez, University of Southern California.

-Casta Painting : Identity and Social Stratification in Colonial Mexico, Ilona Katzew, New York University.

Fondateur - éditeur

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